Avec le futur durcissement des réglementations, mieux vaut investir dans les fonds immobiliers les plus vert possibles

22/02/2021

Olivier Toublan

Immoday 

3 min

Pour Jean-Louis Blanc, gérant de la caisse de pension Bobst Mex, l’immobilier indirect représente environ 180 millions de francs. Il regrette le manque de liquidité des fonds de qualité et une valeur nette d’inventaire qui repose sur des hypothèses parfois un peu trop optimistes.

 

Jean-Louis Blanc gère la Caisse de pensions de Bobst Mex qui couvre, pour la prévoyance professionnelle, l’essentiel des employés des sociétés suisses du groupe Bobst, une des grosses entreprises industrielles de Suisse romande. Elle assure environ 1700 employés actifs, et 1400 pensionnés, retraités, invalides, ou conjoints survivants, avec une masse sous gestion d’environ 1,1 milliards de francs. Dont environ 180 millions de francs est investis dans l’immobilier indirect. Qui a des atouts, mais aussi des inconvénients.

 

Jean-Louis Blanc, quelle est la part d’immobilier indirect dans votre caisse de pension?

L’immobilier représente un tiers de notre masse sous gestion. Une moitié est gérée en indirect, l’autre en direct. Cela s’explique notamment par l’histoire de la caisse de pension, liée à celle de l’entreprise. Les employés de celle-ci ayant besoin de logement à proximité de leur lieu de travail, la Caisse s’est chargée de construire à leur destination des immeubles résidentiels. Aujourd’hui cette classe d’actif a pour but de contribuer à réduire la volatilité de notre portefeuille tout en amenant un rendement régulier.

 

Pour l'immobilier indirect, comment choisissez-vous les véhicules de placement ?

La gestion de l’allocation est faite essentiellement en interne. Nous sélectionnons nous-mêmes, avec l'aide de conseillers externes et d’experts, les fonds dans lesquels nous allons investir. Nous ne donnons pas ce mandat à des banques. Ensuite, nous privilégions les fondations de placement uniquement destinées aux caisses de pension, puis les grands fonds de placement cotés en bourse. Ces derniers pour des questions de liquidité, même s’ils n’ont pas la liquidité qu’on pourrait imaginer ou espérer. Enfin, nous ajoutons des critères de choix portant sur le retour sur investissement, le rendement, et le niveau d’endettement. Qui ne devrait se trouver aux alentours de 15 à 20 %, à mon avis.

Est-ce que le niveau de l’agio du fond rentre dans vos critères de sélection ?

Bien entendu. Néanmoins, l’absence de liquidité du marché rend très difficile de jouer la vente des fonds à agios élevés pour les racheter lorsque ceux-ci auront diminués. J'ai également un peu d’inquiétude pour certains fonds avec un patrimoine immobilier relativement ancien, qui pourraient souffrir quand ils devront procéder à la rénovation de tous leurs immeubles, ce qu’ils seront un jour ou l’autre obligé de faire. Tout cela fait que,

au final, les bons fonds immobiliers sont relativement chers. 
 

C’est-à-dire ?

Le problème avec l’immobilier indirect, c’est l’évaluation des actifs. Dans un fonds, la valeur nette d’inventaire est basée sur une expertise que l’on maîtrise mal, nous les investisseurs. On ne sait pas toujours sur quelles hypothèses l’expert s’est appuyé pour faire son évaluation.  Et quand on le sait, on constate que ces hypothèses ne sont pas toujours réalistes, que ce soit en termes de vacance, ou en termes de rendement locatif et d’évolution des taux. Ils sont souvent trop optimistes. Comme nous gérons aussi de l’immobilier direct, nous avons quand même une certaine connaissance du marché. Par exemple, quand le rendement locatif repose sur un loyer de 300 ou de 350 francs au mètre carré, dans certaines régions, on sait très bien que ce n’est pas très réaliste, et que le taux de vacance sera probablement plus élevé que ce que nous assurent les experts. 

 

Et la faible liquidité des fonds, dont vous parliez tout à l’heure, c’est aussi une inquiétude ?

Pas pour l'instant, mais ça pourrait le devenir à long terme en raison du vieillissement de la population. En effet, les caisses de pension ayant de plus en plus de rentiers, et de moins en moins de rentrée d’argent frais, elles devront un jour ou l’autre vendre leurs actifs, y compris immobiliers, ce qui aura un gros impact sur un marché aussi peu liquide. Mais c’est vraiment à très long terme.

 

Le développement durable, c’est un critère qui compte pour vous ?

Pour l’immobilier direct, effectivement, avec la rénovation de nos immeubles. Mais j’avoue que l’on n’adopte pas les normes les plus exigeantes, car il nous faut garder des loyers bas pour que nos appartements soient attractifs. En particulier dans un environnement où nous prévoyons une hausse des vacances liée à l’aboutissement de projets et l’arrivée d’importantes quantités d’appartements neufs sur le marché dans les années qui viennent (par exemple Métamorphose à Lausanne). Alors, oui, l’efficience énergétique est importante, mais il faut rester pragmatique. Il y a un arbitrage à faire. En revanche, pour l’immobilier indirect, on est vraiment attentif à la problématique du développement durable. De toute manière on va vers un durcissement des réglementations, et mieux vaut dès aujourd'hui opter pour un investissement dans les fonds les plus verts possibles.

 

Olivier Toublan pour Immoday