Qu’est-ce qu’une exploitation immobilière en droit fiscal ?

Qu’est-ce qu’une exploitation immobilière en droit fiscal ?

Cadre légal 5 min Thierry De Mitri

Le TF clarifie sa jurisprudence concernant une restructuration d’une entreprise de personnes en société de capitaux dans un arrêt du 13 novembre 2023 (9C_608/2022). Avoir une exploitation ou une partie distincte d’exploitation est l’une des conditions essentielles de la neutralité fiscale de nombreuses restructurations (scission, filialisation, transformation, etc.). La question qui s’est toujours posée au praticien est celle de savoir à partir de quel moment un parc immobilier peut constituer une exploitation sous l’angle fiscal. Le TF apporte une réponse claire de nature à sécuriser la situation.

Dans le cadre des réorganisations, la volonté du législateur est de favoriser les restructurations d’entreprises dans un objectif de continuité, en évitant qu’une restructuration génère des conséquences fiscales dommageables

Dans ce contexte, l’Administration fédérale des contributions (AFC) a développé une pratique administrative reprise dans sa Circulaire n° 5a du 1er février 2022 (Circulaire AFC 5a/2022) sur les restructurations, en explicitant les conditions cumulatives pour que la notion d’exploitation ou partie distincte d’exploitation puisse être retenue en matière immobilière. S’agissant d’un patrimoine immobilier, la Circulaire AFC 5a/2022 estime que la présence d’une gestion immobilière professionnelle suppose que des critères soient cumulativement remplis :

-    Il y a une participation au marché où des immeubles d’exploitation sont loués à la société du groupe ;

-    L’entreprise occupe ou mandate au moins une personne pour la gérance des immeubles (un emploi à plein temps pour les travaux de gestion immobilière) ;

-   Les rendements locatifs sont au moins vingt fois supérieurs au coût du personnel conforme au marché pour la gérance des immeubles.

En vertu de la pratique fédérale, on admet qu’un revenu locatif d’environ CHF 2 millions permet de retenir une gestion immobilière professionnelle. Cela signifie que le salaire ou le coût d’une gérance des immeubles (société de gérance immobilière) doit être d’environ CHF 100'000 par année. Les pratiques cantonales ont toujours varié à ce sujet, mais reprennent peu ou prou ces facteurs.

Dans une jurisprudence du 13 novembre 2023, le TF s’est penché sur la question de savoir si un parc immobilier pouvait constituer une exploitation dans le cadre du transfert du parc dans une société de capitaux. Un contribuable zurichois âgé de 80 ans s’est constitué un parc immobilier important générant environ CHF 2 millions de revenus nets locatifs. Estimant être titulaire d’une entreprise individuelle, il souhaite transférer le parc immobilier, pour des raisons successorales, dans une SA. Il obtient un accord fiscal préalable de la part des autorités cantonales et de certaines communes. L’une de des communes s’oppose à la neutralité fiscale estimant que le parc immobilier n’est pas « une exploitation ». Le retraité dépose un recours.

Le TF précise que, au sens du droit fiscal, on entend par exploitation tout complexe organisationnel et technique de valeurs patrimoniales qui, en vertu de la fourniture de prestations entrepreneuriales, constitue une unité organique relativement indépendante. Une entreprise se caractérise par un degré élevé d’indépendance et constitue une organisation capable de subsister de manière autonome. Dans ce contexte, la gestion de ses propres immeubles ne présente qu’exceptionnellement les caractéristiques d’une entreprise. Il faut absolument avoir une gestion de type professionnelle et que cela dépasse le cadre de la simple gestion de fortune.

Dans son analyse, le TF se réfère pour la première fois à la Circulaire AFC 5a/2022. Il confirme que les trois conditions susmentionnées permettraient de retenir la présence d’une exploitation. Il ajoute que le fait de mandater une entreprise externe permet de remplir la 3ème condition. En effet, s’agissant en particulier d’un homme de 80 ans, on peut comprendre qu’il ne s’occupe pas lui-même du parc immobilier, mais le confie à des professionnels à même de gérer toute l’activité liée aux baux, à l’encaissement, aux travaux et autres charges administratives importantes en relation avec la gestion d’un parc immobilier représentant des revenus locatifs très importants. Partant, le fait de confier la gestion à un tiers sous la forme d’un mandat est non seulement compatible avec le fait que l’on retienne une gestion professionnelle du parc immobilier, mais est plus efficace économiquement.

Dans le cas d’espèce, le TF confirme la présence d’un parc immobilier constituant une exploitation en s’appuyant sur les critères de la pratique administrative. Le transfert peut donc être effectué en neutralité fiscale sans imposition des plus-values immobilières potentielles.

Dans le domaine de l’immobilier titrisé, cette jurisprudence apporte également une grande sécurité puisqu’elle permet d’envisager des restructurations que ce soit dans le cadre de la détention indirecte des actifs immobiliers par des PCC ou lors de la détention d’immeubles par le biais de SI. Cette jurisprudence devrait avoir un effet également positif dans le domaine des droits de mutation en présence d’une restructuration.

Enfin, le TF a permis d’expliciter la notion d’exploitation découlant du droit fédéral. Dès lors, il nous semble que tous les cantons y compris au niveau de l’impôt cantonal et communal devrait se rallier à cette jurisprudence. Par conséquent, les pratiques administratives cantonales divergentes ne devraient plus être admises au regard de cet arrêt.

Thierry De Mitri

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