Géopolitique, économie et énergie en 2025 : peu de progrès tangibles attendus
En 2025, les tensions géopolitiques devraient continuer à peser sur l'économie mondiale et le PIB mondial ne devrait croître que de 2,5 à 3,0 %.
Alors que l'économie américaine pourrait afficher une performance proche de ces niveaux, les économies européennes devraient rester en deçà de ces performances, même si elles pourraient s'accélérer. L'inflation restera généralement faible et proche des objectifs des banques centrales.
Malgré les efforts dont tous se vantent, la consommation d'énergie devrait continuer à augmenter, les combustibles fossiles représentant plus de 80 % de cette hausse. Au moins trois grands pays - l'Inde, la Chine et la Russie - continueront de dépendre du charbon et, notamment, la Chine atteindra un niveau de consommation de charbon sans précédent. Cela contribuera à ce que les émissions de carbone soient de 70% supérieures aux niveaux de 1990.
Changements démographiques et progrès technologiques à l'échelle mondiale : des perspectives positives pour l'investissement immobilier en 2025
Le paysage mondial connaît de profonds changements démographiques qui remodèlent les économies, les industries et les zones géographiques. De plus les progrès de l'intelligence artificielle (IA) et de l'automatisation transforment les industries et les lieux de travail, tandis que l'impératif mondial de décarbonisation influence tous les secteurs en profondeur.
En matière immobilière les prises à bail de surfaces de bureaux pourraient augmenter, car davantage d'employeurs exigent de nouveau la présence de leurs équipes en présentiel. Les commerces situés dans des emplacements de choix continueront à connaitre de solides performances et les villes touristiques prospéreront compte tenu du fait que les voyages de loisir se multiplient.
Ces forces convergentes, associées à la faiblesse de la production de nouvelles surfaces dans la plupart des secteurs de l'immobilier que ce soit aux États-Unis et en Europe, alimenteront la hausse des loyers et des taux d'occupation.
Tous ces facteurs, ainsi que la détente anticipée des taux d'intérêt sur de nombreux marchés, créent un scénario d'investissement et de rendement particulièrement convaincant pour 2025.
Ainsi, Savills prévoit que l'investissement immobilier mondial - qui aura augmenté de 7 % pour atteindre 747 milliards de dollars en 2024 - continuera à progresser pour atteindre 952 milliards de dollars en 2025.
Ce sentiment positif est également partagé par JLL, qui indique que la confiance des investisseurs est à son plus haut niveau depuis trois ans, se rapprochant même de niveaux observés il y a cinq ans.
Tout ce qui précède laisse bien entendu entrevoir des perspectives positives. Cependant, les défis pourraient être nombreux. Notamment, d'importantes incertitudes persistent en ce qui concerne la géopolitique et les politiques économiques, réglementaires, fiscales et commerciales. Pour paraphraser le rapport ETRE 2025 de PwC, cette situation d’incertitudes multiples est d’ailleurs peut-être devenue, une nouvelle constante.
Aussi les investisseurs doivent aborder la nouvelle année avec optimisme, mais avec un optimisme mâtiné de prudence.
Secteurs : quelques exemples de sous-secteurs prometteurs
- Datacenter : ils occupent désormais une position unique et en pleine expansion. Stimulés par la demande florissante des entreprises liées à l'IA, souvent soutenues par d’importants moyens financiers apportés par des VC, ces installations connaissent une croissance fulgurante. Par exemple, et pour ne parler que États-Unis, EY et The Economist, estiment qu'environ 30 % des entreprises investiront 10 millions de dollars ou plus dans l'IA, contre 16 % en 2024. La nécessité de traiter de vastes ensembles de données et de soutenir les plans d'expansion extrêmement ambitieux de ces entreprises crée de potentielles pénuries d’offres sur de nombreux marchés. À tel point que la Big 4 « PwC » classe les Datacenter comme le premier secteur à surveiller en 2025.
- Secteur résidentiel : À l'échelle mondiale, le secteur résidentiel est confronté à une confluence de défis et d'opportunités. Pénurie aiguë de logements, problèmes d'accessibilité sans précédent et évolution des tendances démographiques font partie des défis. Du côté des opportunités, et sur les marchés développés, la préférence croissante pour la location offre des options d'investissement attractives aux niveaux macro et micro. Cette tendance est d’ailleurs renforcée par des facteurs tels que l'évolution des préférences en matière de mode de vie et la flexibilité accrue de l'emploi.
- Le secteur industriel : L’investissement industriel devrait rester un secteur attrayant. Il a connu une croissance significative pendant la pandémie, alimentée par l'essor du commerce électronique. Ceci a été notamment nourri par les changements dans le comportement des consommateurs de nombreux groupes démographiques plus âgés qui ont à cette occasion adopté des habitudes d'achat en ligne qu’ils n’ont depuis pas abandonnées. Par ailleurs, la pandémie a mis en évidence l'importance stratégique de la gestion des stocks « au cas où », qui s'éloigne des modèles purement « just in time ». Résultat ? … l’offre de surfaces industrielles et de stockage a dû croitre et continue à croitre. Et la réorganisation du secteur est encore renforcée par les tensions géopolitiques, les différends commerciaux entre grandes zones géographiques, les tendances à la démondialisation, les politiques industrielles nationalistes et la reconfiguration des chaînes d'approvisionnement visant à régionaliser la production….
Des perspectives régionales différenciées
- Amérique du Nord : Cette région devrait être en tête de la croissance des investissements. Savills prévoit que les investissements atteindront 575 milliards de dollars, soit une augmentation substantielle de 38 % d'une année sur l'autre. Cette forte croissance est soutenue par une économie robuste et une demande continue dans les différentes catégories d'actifs.
- Europe : les conditions semblent favorables aux acquisitions stratégiques de bureaux en France et dans quelques autres pays de l'UE. La création de nouvelles surfaces a été très limitée sur les principaux marchés européens, en particulier pour les immeubles de bonne qualité environnementale pour lesquels certains locataires de premier plan sont prêts à payer des loyers premium. Ceci conduit à des opportunités d’investisseurs attractives pour ceux qui ont accès à ces actifs. En termes de localisation, Londres reste l'un des marchés les plus actifs - bien qu'à un niveau limité par rapport aux moyennes historiques -. Cette ville devrait offrir des gains en capital et en rendement dans la plupart des sous-secteurs et en particulier dans le logement et les datacenters.
- L'Asie : Les perspectives pour l'Asie sont plus nuancées. L'économie APAC devrait croître de 3,5 à 4 % en 2024 et 2025. L'Inde, devrait voir ses niveaux de croissance se maintenir à au-delà de 6 % jusqu'en 2026. Le Viêt Nam, les Philippines, la Malaisie et l'Indonésie devraient également connaître une croissance d'environ 5 % ou plus. D'autre part, la Chine continentale et Hong Kong ont, eux, connu des corrections importantes. Même s’il existe de plus en plus de doute sur la fiabilité des données publiées, il apparait que la croissance du PIB de ces deux localisations sera désormais inférieure à 5-6 %. Ce qui inquiète également c’est le manque de confiance dans la cohérence et l'efficacité des politiques du gouvernement chinois. Par exemple l’abaissement des taux d'intérêt n'a pas permis de boosté la reprise du marché immobilier comme l’illustre le graphique ci-dessous qui montre un marché toujours en déclin pour les crédits hypothécaires (source : Macquarie AM sur la base de données Bloomberg).
Les incertitudes géopolitiques ont encore freiné l’arrivée de capitaux étrangers en Chine, une tendance qui ne devrait pas s'inverser à court terme.
En revanche, le Japon présente une image plus positive. Le renforcement de la croissance des loyers offre un potentiel de hausse de la valeur des actifs grâce à la croissance du revenu net d'exploitation.
En Suisse : les performances devraient à nouveau être plus élevés en 2025
La tendance à la hausse des loyers résidentiels s'est légèrement interrompue. FPRE fait état d'une baisse de 0,5 % au troisième trimestre 2024 (mais tout de même d'une hausse de 5 % en glissement annuel).
Malgré cela, les prix de transaction des immeubles ont augmenté et devraient continuer à augmenter : ils suivent la tendance à la compression des rendements issue de l'alignement sur les taux d'intérêt.
Les rendements des transactions dans les secteurs résidentiel et commerciaux sont actuellement légèrement supérieurs à ceux de 2021. Bien que le taux d'intérêt à 10 ans en Suisse soit tombé à 0,35 % en fin d’année 2024, les primes de risque basées sur les rendements des transactions restent légèrement inférieures à celles de la phase de taux d'intérêt négatifs. La prime de risque réelle pour les taux d'actualisation est ainsi passée de 3,1 % à la mi-2023 à 4,1 % aujourd'hui.
Malgré certaines inquiétudes concernant les politiques à moyen et long terme de la Banque nationale suisse, l'environnement actuel soutient les valeurs immobilières suisses, et les investisseurs pourraient donc continuer à bénéficier de belles performances.
Dan Bihi-Zenou