2022, les chiffres d'une année difficile pour les fonds immobiliers

07/02/2023

Immoday

Olivier Toublan

5 min

Des cours de bourse qui se sont effondrés, un tiers des fonds qui affichent des agios négatifs, l'année a été difficile pour les fonds de placements immobiliers. Et plus particulièrement pour l'immobilier commercial. 

 

L'année 2022 s'est terminée par une légère reprise de la bourse, qui a aussi bénéficié aux fonds immobiliers côtés. Mais cela n'aura de loin pas suffit à effacer une année difficile pour tout le secteur. Comme le montrent les chiffres clés, publiés il y a quelques jours par Credit Suisse Asset Management. Revenons un instant sur les principales conclusions de ce rapport.

 

En bourse, une baisse moyenne de 15% 
 

Globalement, les fonds immobiliers côtés ont perdu 15,2 % en bourse en 2022. Au 31 décembre, la capitalisation boursière globale du secteur (qui continue néanmoins de croître, avec l'arrivée régulière de nouveaux fonds), n'était plus que de 55 milliards de francs, alors qu'elle approchait encore les 65 milliards un an auparavant. 
 

Dans cette tempête, aucun fonds n'a surnagé, tous ayant affichés des performances négatives en 2022. Même si certains, comme Dominicé Swiss Property ou Suisse Romande Property, avec une baisse inférieure à -2%, s'en sortent mieux que les autres. Il est vrai, dans des volumes négociés mensuels faibles.
 

A l'inverse, d'autres font nettement moins bien que la moyenne. En effet, cinq fonds ont affiché une baisse de plus de 20 % en 2022, la plus mauvaise performance étant celle de CS Ref Green Property, avec une baisse de presque 28 %!
 

Si l'on prend du recul, l'image du secteur est un peu moins maussade, avec une augmentation moyenne des cours de presque 3 % par an, ces 5 dernières années. Cependant, six fonds affichent une performance négative durant cette période, la pire étant celle de CS Ref International, avec une baisse annuelle moyenne de 5,5 %, et Residentia, avec une baisse annuelle de 3,8 %.

 

Des agios qui s'effondrent 
 

Mécaniquement, la baisse des cours a entraîné celle des agios qui étaient, au 31 décembre, en moyenne de 13,6% pour les fonds côtés. 
 

S'il fallait conserver un seul chiffre pour résumer la fin de l'euphorie qui s'était emparée du marché des fonds immobiliers depuis 2008, ce serait celui-ci. D’autant plus que la chute a été rapide, très rapide. On est désormais très loin des 42% d'agio moyen, observés au 1er janvier 2022. Et loin aussi de la moyenne historique des agios du secteur, calculée par Credit Suisse Asset Management pour ces 30 dernières années, qui est d'un petit peu moins de 20 %.
 

Peut-être encore plus préoccupant et signe clair de la défiance des investisseurs, fin 2022, 15 fonds affichaient un agio négatif, soit plus d'un tiers du total des fonds immobiliers côtés en Suisse. Pour rappel, il n'y avait que deux fonds avec un diasagio, léger, un an plus tôt. 

 

L'immobilier commercial inquiète les investisseurs  
 

Parmi ces mauvais élèves, six fonds avaient un disagio proche ou supérieur à -15 %, la pire situation étant celle de CS Ref International, avec un disagio de presque 27 %!
 

A l'inverse, on constate que les investisseurs privilégient certains fonds, deux d'entre eux, La Foncière et Immofonds, ont un agio toujours supérieur à 30 %. Pour ces deux véhicules, en un an, la chute a été toute aussi impressionnante puisque, au 1er janvier 2022, tous deux affichaient un agio aux environs de 70 %.
 

Plus largement, les investisseurs sont particulièrement pessimistes quant aux perspectives de l'immobilier commercial. En effet, quasiment tous les fonds qui investissent dans ce secteur ont un agio négatif, en moyenne d'à peu près -5%. 
 

Finalement, le manque d'intérêt des investisseurs se confirme par une dernière statistique intéressante publiée par Credit Suisse Asset Management : le lien entre le niveau des agios et les taux d'intérêt à long terme, les deux étant, en effet, assez fortement corrélés. Selon cette analyse, le niveau actuel des agios est clairement inférieur à ce qu'il devrait être - aux alentours de 17 % - dans l'environnement de taux actuel.

 

Des rendements moins attractifs 
 

Avec la forte baisse des cours, automatiquement, les rendements sur distribution sont à la hausse. Ils étaient, en moyenne, de 2,3 % au 31 décembre 2021 et ont grimpés à 2,8 % fin 2022. Clairement toujours plus intéressant que le rendement des emprunts de la Confédération, même après la hausse des taux. Par contre, l'écart entre les rendements des fonds et le taux des emprunts de la Confédération n'a jamais été aussi bas depuis la crise financière de 2008. Alors qu'il était à son maximum, environ 3,5 %, à la mi 2019, il est aujourd'hui inférieur à 1,5%. La question étant désormais de savoir si, pour les investisseurs, cette prime de 1,5 % est suffisante pour justifier le risque d'un investissement dans l'immobilier, dans un environnement où le prix des biens stagne et pourrait même baisser dans les mois qui viennent, selon certains experts. 
 

Autre chiffre qui montre la baisse de l'intérêt de la part des investisseurs, celui du volume négocié, qui a reculé d'environ 10 % sur un an, à 578 milliards de francs. 
 

Bref, comme on l'avait dit, une mauvaise année pour les fonds immobiliers. A voir comment se passera 2023, avec des taux d'intérêt qui pourraient encore grimper et donc réduire encore l'attractivité des investissements en immobilier pour les institutionnels.

 

Les sociétés immobilières résistent un peu mieux 
 

Du côté des sociétés immobilières, les chiffres sont aussi dans le rouge vif, même si ces dernières résistent un peu mieux que les fonds placements. En effet, en moyenne, la baisse a été de « seulement » -9 % en 2022.  Par contre, ici aussi, les primes sont en chute libre. Alors qu’en 2019 elles étaient brièvement devenues plus élevées que les agios des fonds de placement, elles se sont effondrées l'année dernière, jusqu'à devenir, en moyenne, négatives. La décote étant, au 31 décembre, de -1,2 %, alors qu'au premier janvier 2022 la prime moyenne  était encore de presque 19 %.
 

Quand au rendement de distribution, il s'est affiché à 3,6 % à la fin de l'année dernière, contre 3,2 % l'année précédente.


 

Olivier Toublan, Immoday