
Le crowdfunding immobilier promet des rendements supérieurs à l'immobilier titrisé traditionnel, ce qui intéresse les investisseurs privés, mais aussi les institutionnels. Reste que ces derniers demeurent encore frileux, du moins tant que les véhicules d'investissement proposés ne sont pas régulés par la FINMA. Ce qui va être prochainement le cas, assure Dan Amar, CEO de Foxstone, un des principaux acteurs du crowdfunding immobilier en Suisse, qui fourmille de nouveaux projets, mêlant tous technologies et investissements immobiliers.
Le crowdfunding immobilier commence à se populariser en Suisse. Il touche de nouvelles catégories d'investisseurs, attirées par des rendements supérieurs à ceux de l'immobilier titrisé traditionnel. Nous avons publié récemment le point de vue d'un avocat sur ce nouveau type d'investissements, nous donnons aujourd'hui la parole à Dan Amar, fondateur et CEO de Foxstone, un des principaux acteurs du crowdfunding immobilier en Suisse.
Dan Amar: Foxstone Real Estate Crowdfunding, c'est quoi?
Comme l'indique son nom, Foxstone est une plateforme de crowdfunding immobilier fondée en 2017, pour donner accès aux investisseurs privés à des opportunités d’investissement immobilier de première qualité en Suisse, que ce soit l’achat d’immeubles de rendements ou des prêts à des promoteurs immobiliers. Avec une idée essentielle en tête: dépoussiérer le secteur grâce à la tech.
Quand vous vous êtes lancé, c'était une approche relativement nouvelle de l'investissement immobilier, du moins en Suisse romande. Avez-vous rapidement réussi à convaincre les investisseurs?
Le premier immeuble a mis plus de neuf mois à être financé, personne ne nous connaissait. Aujourd’hui, avec la confiance que nous avons acquise auprès de nos investisseurs, les derniers immeubles ont été financés en moins 24 heures.
Ce qui représente combien d'immeubles aujourd’hui?
Nous avons déjà acquis plus de 50 immeubles pour un volume total dépassant les 250 millions de francs suisses. Pour les prêts, c’est plus de 100 millions de francs suisses, dont 35 millions ont déjà été remboursés.
Pour combien d’investisseurs?
Foxstone compte 26'000 investisseurs inscrits sur la plateforme, répartis sur toute la Suisse. Notons que tout se fait en ligne sans jamais quitter son salon : choix de l’immeuble, signature des documents, légalisation des signatures devant notaire en vidéo conférence.
Qui est votre investisseur type?
Aujourd’hui, la grande majorité de nos investisseurs sont des privés: médecins, financiers, enseignants, ingénieurs… Toute la société suisse est représentée.
Vous avez aussi des investisseurs professionnels?
Oui, nous avons aussi des clients fortunés et un fonds de pension. Notre objectif est désormais de nous ouvrir à tous les types d'investisseurs professionnels : family offices, gérants indépendants, banques privées ou institutionnels. Ils sont très demandeurs.
Pour convaincre les institutionnels, vous devriez être agréé par FINMA, ce qui n'est pas encore le cas.
En effet, lorsque nous vendons des parts d’immeubles en direct, il ne s’agit pas de produits financiers — c’est comme vendre un appartement. Aucune autorisation de la FINMA n’est requise pour cela. En revanche, pour le prêt participatif, nous sommes supervisés. Nous avons déjà reçu des demandes de modifications de la part de la FINMA car nous avons grandi rapidement. Nous les avons intégrées aussitôt, ce qui a été salué par l’autorité.
Vous aviez pourtant laissé entendre que vous vouliez obtenir une autorisation de la FINMA pour toutes vos activités.
Nous sommes en cours d’obtention de cette licence. Cela prend du temps, mais nous avons reçu des retours très positifs de la FINMA. Une étape a été franchie récemment avec une validation écrite pour poursuivre la procédure. Cette licence nous permettra de proposer de nouveaux produits financiers aux professionnels et aux institutionnels. C'est la prochaine étape de notre développement.
Pour un investisseur, en quoi une société de crowdfunding est-elle plus intéressante qu’un fonds de placement immobilier?
La grande force de notre modèle, c’est la simplicité et la transparence. L’investisseur choisit un immeuble, reçoit un rapport trimestriel, et perçoit chaque mois ses loyers directement sur son compte bancaire. Tout est réglé comme une montre suisse. Il sait où il investit, comprend les flux, et peut suivre facilement la performance.
Quels sont les types de biens que vous recherchez?
Nous ciblons principalement des immeubles résidentiels situés dans les grandes villes suisses ou leurs agglomérations proches, bien connectés par les transports publics. Notre critère clé, c'est un bassin d’emploi soutenu pour garantir la stabilité des loyers. Nous avons commencé en Suisse romande, mais nous achetons désormais aussi en Suisse alémanique, où la demande est très forte.
Uniquement du résidentiel?
Non, nous avons également acquis des biens commerciaux – par exemple, un immeuble de 17 millions en face de l’aéroport de Genève – et nous allons continuer dans cette direction.
Les achats sont-ils limités aux immeubles?
Actuellement, nous achetons des immeubles existants. Cela dit, nous développons un nouveau format destiné aux investisseurs professionnels et aux institutionnels: des véhicules régulés par la FINMA, qui permettront d’investir dans les fonds propres de projets en développement ou à construire.
Juridiquement, comment ça se passe? La société de crowdfunding achète un bien et le revend ensuite aux porteurs de parts?
Non, ce n’est pas le modèle. Foxstone engage ses propres fonds pour réserver un immeuble via un dépôt, puis réalise une due diligence complète. Une fois le projet d'acquisition validé par notre comité d’investissement, la dette hypothécaire est négociée et sécurisée, avec des taux bloqués. Puis le projet est mis en ligne pour lever les fonds propres. Les investisseurs achètent ensuite directement une quote-part de l’immeuble, inscrite à leur nom au registre foncier. Tout est encadré par un contrat de copropriété très strict.
Et comment ça se passe du côté des banques?
Chaque investisseur est considéré comme emprunteur, mais non codébiteur solidaire. C’est une distinction importante : aucun investisseur ne peut être tenu responsable des dettes d’un autre. Chacun est responsable uniquement de sa part. C’est le fruit de longues négociations avec les banques hypothécaires. Le contrat de copropriété que nous avons mis en place permet de gérer tous les cas sensibles (faillite, décès, etc.) et inclut des droits d'emption pour l’administrateur pour qu'il puisse racheter les parts problématiques afin de protéger la communauté. Dans notre futur modèle, une société empruntera à la banque, ce qui simplifiera les choses pour l’investisseur et pour les banques.
Vous parlez de rendements très élevés, entre 4% et 8%: est-ce réaliste?
Oui, c’est réaliste. Notre sélection drastique des immeubles, combinée à une gestion rigoureuse, permet à 80–85% de nos biens de surperformer les rendements annoncés. Avec un taux de vacance de 0% sur tout le portefeuille. Il est vrai que nous sommes aidés par un marché locatif très tendu en Suisse.
Vous devez probablement utiliser un gros effet de levier pour atteindre de tels rendements?
Nous utilisons en fait un levier assez modéré: entre 60% et 66% en premier rang hypothécaire, ce qui n’est pas agressif. Pour plus de sécurité, les loyers couvrent 3 à 5 fois les intérêts bancaires. En outre, nous fixons les taux hypothécaires sur 5 à 7 ans pour éviter les hausses de taux, ce qui a très bénéfique pendant la période de la pandémie durant laquelle les taux ont fortement augmenté alors que les financements de nos immeubles n’ont pas bougé d’un millimètre. Et finalement nous analysons en détail les revenus des immeubles, avec des scénarios stress test pour garantir leur capacité à honorer les dettes même en cas de choc.
Quelles sont les commissions que vous touchez?
Nous prélevons 3% lors de l’achat de l’immeuble, pour couvrir la recherche, l’analyse, la structuration et la sécurisation du deal. Ensuite, des frais de gestion annuels modérés permettent de rémunérer l’équipe en charge de la gestion.
Certains investisseurs professionnels critiquent le manque de transparence des commissions secondaires…
Pourtant, chez Foxstone, la transparence est très élevée. Chaque année, les copropriétaires participent à l'assemblée générale (en ligne, via notre plateforme) des copropriétaires des immeubles dans lesquels ils ont investi où tout est voté. Tous les frais sont expliqués sur la plateforme et les investisseurs ont souvent des contacts avec nos équipes de vente pour une transparence accrue.
Comment se négocie la revente des parts?
Comme il s’agit d’un bien immobilier inscrit au registre foncier, toute revente passe par un notaire. Foxstone organise tous les documents et les opérations de cette étape.
Donc il n'y a pas de marché secondaire?
Une sorte de marché secondaire est tenu par Foxstone, de type best effort, d’abord auprès des copropriétaires, puis au sein de notre communauté d’investisseurs.
Ce marché fonctionne, mais il n’est pas vraiment liquide. C’est pourquoi nous conseillons un horizon d’investissement de 5 à 7 ans, cycle typique d’un investissement non liquide, pour pouvoir donner le temps à l’asset manager de générer de la performance.
Mais, juridiquement, pour vous, tenir un marché secondaire n'est pas une obligation?
Non, ni d’avoir un market maker. C’est un service que nous rendons à nos investisseurs. Notons cependant que les futurs produits financiers que nous développons offriront une bien meilleure liquidité grâce à une structure 100% titrisée, sans que l’investisseur n’ait de contact avec un notaire. Finalement, dans une étape ultérieure nous passerons cette titrisation sur la blockchain, ce qui permettra des échanges instantanés entre investisseurs, 24h/24.
Rédaction • Immoday.ch
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