
Comme l'indique son nom, ce nouveau véhicule immobilier, fermé, se focalise sur les viagers. Il a déjà investi dans une vingtaine de biens immobiliers et cherche encore à lever 75 millions de francs. Pas facile pour un fonds novateur, unique en Suisse, qui intéresse beaucoup, mais qui n'a pas encore de track record, ce qui incite les investisseurs à la retenue. Mais César Pidoux, le responsable du fonds, est confiant : les premiers résultats sont là, conformes aux promesses de rentabilité.
Viager Swiss SCmPC a été lancé, fin juin 2024. Un véhicule immobilier assez novateur puisqu'il creuse une niche jusque-là encore inexploitée : les viagers, ce qui pourrait intéresser les investisseurs à la recherche de diversification. D'autant plus que le fonds offre un positionnement unique sur le marché des biens individuels et vise une performance moyenne finale nette de plus de 5%. Reste maintenant à convaincre. On en discute avec le responsable du fonds, César Pidoux, de GEFISWISS.
César Pidoux, Viager Swiss SCmPC a été lancé fin juin 2024, un peu plus tard que prévu initialement, que s'est-il passé ?
C'est toujours le cas avec les produits innovants : il faut convaincre tout le monde, les autorités financières, les vendeurs de biens immobiliers et les investisseurs. Ce qui a pris un peu plus de temps que prévu, même si, dès le départ, nous avons rencontré un fort intérêt. Naturellement, au début, on est scruté par les investisseurs qui, hormis les plus innovants et les plus entrepreneurs, attendent que nous fassions nos preuves.
Quels étaient les principaux freins ?
Comme nous n'avons aucun track record et que notre produit est une totale nouveauté dans l'univers des véhicules de placement immobiliers, il a fallu redoubler d'efforts pour convaincre les investisseurs. Ils nous ont aussi posé des questions sur l'éthique du fonds. En effet, certains assimilaient le viager à un pari sur la mort. Mais nous avons pu démontrer que c'était tout le contraire avec notre approche, que notre fonds avait un impact clairement positif au niveau social.
Vraiment ?
C'est incontestable. En Suisse, où il n'y a pas d’obligation de rembourser ses hypothèques, on se retrouve chaque année avec des milliers de retraités qui peinent à renouveler leur emprunt hypothécaire. En effet, ils n'ont plus le revenu nécessaire pour satisfaire aux critères très stricts des banques (si vous avez encore une dette hypothécaire de 1 million, la banque exige jusqu'à 180000 francs ou plus de revenus annuel). En conséquence, certains propriétaires âgés doivent quitter un logement dans lequel ils habitent parfois depuis des dizaines d'années. Dans ce contexte, le viager leur permet de rembourser la dette hypothécaire, améliorer leur autonomie financière et continuer à vivre plus sereinement dans leur logement. Il n'y a pas plus social que ça.
Rappelez-nous ce qu'est un viager.
Une personne âgée - nous entrons en matière à partir de 70 ans mais nous avons constaté que la moyenne est plutôt proche des 80 ans - vend sa maison mais en conserve l'usufruit, c'est-à-dire le droit d'y habiter, jusqu'à sa mort. Lors de cette vente, le prix du bien immobilier est versé sous trois forme, le droit d'habitation (la valorisation de cet usufruit), une rente viagère et un versement en liquide appelé « le bouquet ».
Un bouquet qui doit servir à rembourser l'emprunt hypothécaire ?
En effet, et c'est une de nos exigences. Ensuite, nous garantissons la rente en versant une prime unique à une société d'assurance, qui s'occupera ensuite du paiement de la rente. Enfin, le droit d'habitation est inscrit au registre foncier. Ce sont des sécurités supplémentaires par rapport au viager traditionnel, qui se fait de gré à gré.
Comment est déterminée la valeur du bien ?
Par un expert du CIFI ou de CBRE. Nous ne négocions pas ces estimations, faites de manière indépendante. Le droit d’habiter est déterminé quant à lui par l’actuaire du fonds. Notre approche est totalement transparente vis-à-vis du vendeur qui jusqu’au dernier moment peut se retirer de la vente.
Votre fonds achète donc des viagers, quelles sont ses caractéristiques ?
Viager Swiss est une SCmPC qui cherche à lever 100 millions de francs, ce qui, avec l'effet levier de la dette et les spécificités du viager, devrait nous permettre d'acquérir pour 200 millions de francs de biens immobiliers, soit environ une centaine de biens. C'est largement suffisant pour permettre une diversification des investissements, avec la volonté de diminuer le risque de longévité, qui est le principal risque d'un contrat de viager.
Quel est le rendement attendu du fonds ?
Nous estimons la performance annualisée moyenne nette, après impôts, à 5%. Cet objectif ne tient pas compte des possibles mises en valeur. Les premières distributions devraient commencer en 2027 puis croître au fur et à mesure de la vie du fonds.
Pourquoi la forme d'un SCmPC, une Société en Commandite de Placements Collectifs ?
Cela découle d’une volonté de la FINMA. Une SCmPC permet de limiter le produit aux investisseurs qualifiés, avec une durée de vie de 15 ans, plus 2 x 2 ans, si nécessaire, pour finaliser la cession des derniers biens immobiliers et liquider le fonds. Nous aurions sans doute préféré un produit ouvert, ça aurait été plus facile auprès des investisseurs. Peut-être pour une prochaine étape. Ceci dit, chez GEFISWISS, la SCmPC est une structure que nous connaissons bien, puisque c'est la sixième que nous lançons.
Combien coûte une part ?
Les parts ont été proposées à 100’000 francs, et, selon les dernières estimations, fin décembre 2024, elles valaient déjà 102’656 francs.
Vos frais de gestion sont-ils élevés ?
Pas vraiment. Nous avons certes aujourd'hui un management fee de 1,5 %, mais uniquement jusqu'à la fin de la période d'investissement, c'est-à-dire fin 2026 au plus tard. Ensuite, il y aura des frais de gestion annuels de 0,5 %, conformes aux pratiques du marché.
Et qui s'occupe de la gestion du fonds ?
La société Viage SA, dirigée par François Normand, amène les biens immobiliers en exclusivité pour le fonds et s’occupe du suivi des dossiers. La Banque Cantonale Vaudoise est notre banque dépositaire et GEFISWISS assure la gestion du portefeuille. Mais comme pour toute SCmPC, c’est le conseil d’administration du General Partner qui prend les décisions d’investissement et de désinvestissement.
Vous avez lancé l'année dernière une augmentation de capital de 100 millions de francs qui n'a pas été complètement souscrite. Que s'est-il passé ?
Attention, comme nous sommes une SCmPC ce n'était pas une augmentation de capital mais une période de souscription, qui ne se terminera que fin 2025. Nous continuons à démarcher les investisseurs, à qui nous pouvons désormais prouver la validité de notre approche, puisque nous avons déjà de premières libérations. La première vente réalisée a démontré notre capacité à acquérir et vendre au juste prix.
Combien avez-vous déjà réussi à lever ?
Environs 25 millions de francs, ce qui, avec l'effet levier, nous permet d'acheter pour 50 millions d'immobilier. Aujourd'hui nous avons investi plus de 40 millions, ce qui représente 23 biens, avec une durée estimée des droits d'habitation d'un peu moins de 7 ans.
Quel type de bien immobilier recherchez-vous ?
Des propriétés individuelles, résidences principales ou secondaires, maisons ou appartements. Avec une préférence pour les maisons qui possèdent une parcelle avec un potentiel de développement, ce qui nous permettrait, à la libération du bien, de lancer des projets immobiliers au profit de nos investisseurs. Nous visons une part d’environ 60 % de maisons individuelles et 40 % d'appartements en PPE.
Vous trouvez facilement des biens à acheter ? Le viager ne semble pas très populaire en Suisse.
En fait la demande nous a surpris. Que ce soit pour régler la succession du bien immobilier, en raison de problèmes de refinancement, ou simplement pour rendre liquide son patrimoine et en profiter, de nombreux propriétaire considèrent le viager comme une solution adéquate à leur situation. Au travers de notre partenaire la société Viage, nous recevons de nombreuses offres que nous évaluons. Elles nous permettent de constituer un portefeuille correspondant à nos objectifs et stratégie d’investissement.
Vous en avez beaucoup dans le pipeline ?
Nous avons pour 30 millions de francs de biens immobiliers qui sont prêts à être achetés, et un peu plus de 50 millions qui sont à l'étude. Les investisseurs sont donc les bienvenus !
Rédaction • Immoday.ch