Si l'année 2024 à clairement été euphorique pour l'immobilier titrisé, avec le retour des investisseurs de taille importante, ce sont surtout les produits bien connus qui en ont profité. Peu de nouveaux véhicules ont été lancés et les fonds anciens ont bénéficié de l’afflux des capitaux. Pour 2025, la fusion des fonds Credit Suisse et UBS sera au centre de toutes les discussions, expliquent les spécialistes d'IMvestir Partners SA.
Après une année 2024 euphorique pour l'immobilier titrisé, que nous réserve 2025 ? Nous avons interrogé Lucia Morgillo, CEO, et Laure Carrard, CIO, d'IMvestir Partners SA, une société de conseil spécialisée dans l'analyse quantitative et qualitative de l'immobilier indirect en Suisse. Voici un résumé de leur analyse.
1. L'année a été positive pour IMvestir Partners
Avec 37augmentations de capital pour les fonds cotés et non cotés en 2024, représentant plus de 3 milliards de francs levés, soit environ +233 % par rapport à 2023, les services d'IMvestir Partners ont été souvent sollicités, entraînant la publication de nombreuses factsheets qui informent sur ces opérations en capital pour aider les investisseurs à avoir une vision qualitative complémentaire aux factsheets officielles dites quantitatives. Parallèlement, la grande manifestation annuelle organisée par la société de conseil a réuni plus de 180 participants, ce qui en fait un des rendez-vous plus importants de l'immobilier titrisé en Suisse romande.
2. Les produits structurés lancés par IMvestir Partners ont tenu leurs promesses
Au 2ème semestre 2023, IMvestir Partners a pu accompagner 2 lancements de certificats AMC, des véhicules d'investissement spécialisés dans l'immobilier titrisé, créés sur mesure pour répondre aux besoins spécifiques des clients, focalisés soit sur le rendement du dividende, soit sur les performances boursières. En 2024, ces véhicules ont pleinement bénéficié du rallye, à la satisfaction des clients.
3. Les institutionnels ont privilégié les produits bien connus
Si 2024 a vu le retour des investisseurs institutionnels dans l'immobilier titrisé, ces derniers ont clairement privilégié les produits bien connus, qui sont aussi, souvent, les fonds les plus liquides avec des stratégies peu risquées. Ces derniers ont profité de cet intérêt pour multiplier les augmentations de capital, parfois gigantesques, comme les 610 millions de francs levés par Swiss Life REF ESG Swiss Properties au mois de juillet. L'appétit des investisseurs était tel que même des montants de cette importance ont été absorbés sans ciller par le marché, ce qui a surpris plus d'un spécialiste.
4. L'euphorie a été moindre pour les fonds non cotés
Si les institutionnels ont privilégié les valeurs sûres, cela s'est fait au détriment des fonds non cotés, qui pâtissent de leur manque de liquidité et de leur forte volatilité sur les deux dernières années. Pour preuve, certaines augmentations de capital lancées par des véhicules non cotés n'ont pas complètement atteint leurs objectifs. Même les agios élevés affichés actuellement par les fonds cotés - leur moyenne dépasse aujourd'hui les 30% - n'ont pas encore réussi à convaincre les gros institutionnels de revenir vers les véhicules non cotés.
5. Les pressions augmentent pour rentrer en bourse plus rapidement
Dans ce contexte, la pression exercée par les investisseurs sur les fonds non cotés augmente, pour les inciter à entrer en bourse plus rapidement même si la taille critique, qui était généralement estimée à 500 millions de francs minimum, n'est encore pas atteinte. Ce qui n'est pas forcément une bonne stratégie, puisque le fonds sera certes plus liquide, du moins en théorie, mais il aura toutefois de la peine à être visible et risquera d’être noyé dans les indices, face, par exemple, à des mastodontes comme UBS Sima, qui pèse aujourd’hui plus de 11 milliards de francs.
6. L'attitude des investisseurs n'est pas propice au lancement de nouveaux produits
Focalisés sur les valeurs sûres, les investisseurs s’aventurent peu à investir dans de nouveaux produits novateurs. Il est à espérer qu'en 2025 ces investisseurs vont retrouver un certain goût du risque, ce qui permettrait à ces nouveaux produits, indispensables pour le dynamisme et l’efficience du secteur, de se lancer.
7. Les augmentations de capital vont continuer en 2025
Quoi qu'il en soit, la demande des investisseurs va perdurer en 2025, d'autant plus que la BNS a à nouveau baissé ses taux directeurs et que le spread reste en faveur de l'immobilier titrisé. Les fonds immobiliers vont certainement en profiter, en lançant de nouvelles augmentations de capital, leur permettant de saisir des opportunités sur le marché des transactions pour renforcer leurs portefeuilles et de financer les investissements ESG pour améliorer la durabilité de leurs immeubles.
8. La fusion des fonds Credit Suisse et UBS va rebattre les cartes
Le grand sujet de discussion, en 2025, sera la fusion, annoncée fin novembre, de plusieurs fonds Credit Suisse et UBS. Elle aura un impact important sur plusieurs institutionnels qui, pour des questions de diversification des risques seront enclins de changer l'allocation d'une partie de leurs fonds. Ces mouvements pourraient également créer des opportunités pour d’autres acteurs de taille importante et suffisamment diversifiés. Ceci dit, pour l'instant, plusieurs incertitudes demeurent, ces fusions, qui devraient s'étaler sur 3 ans, sont encore sujettes à des approbations légales et dépendent des ruling fiscaux obtenus.
9. Les prix de l'immobilier devraient continuer à croître et les rendements à baisser
Le nouvel abaissement du taux de référence de la BNS, mi-décembre, va pousser les prix de l'immobilier à la hausse ces prochains mois, avec, évidemment, un impact sur les rendements, ce qui représente un défi pour les Asset Managers. Dans ce contexte, il faut espérer que qu’ils ont saisi les opportunités sur les mois précédents et que cette hausse des prix reste raisonnable. Un autre élément à prendre en compte, les investissements ESG, pour répondre aux objectifs 2030 de la Confédération, qui vont indéniablement continuer à modifier les business plans des immeubles en portefeuilles.
10. Il existe d’autres moyens de diversification
La plupart des investisseurs n'ont juré que par l'immobilier résidentiel en 2024. C'est dommage, car d'autres secteurs, comme le commercial, ont montré leur résilience, dans des conditions économiques difficiles de ces dernières années. Aujourd'hui, avec des fondamentaux solides, une économie saine, des taux de vacances faibles, ce secteur pourrait offrir des opportunités de diversification intéressantes aux investisseurs, et des rendements au final supérieurs à ceux de l'immobilier résidentiel, sans que le risque supplémentaire soit trop élevé.
Rédaction-Immoday.ch