
Le Biopôle, près de Lausanne, qui réunit 150 entreprises spécialisées dans les sciences de la vie, est aussi un important projet immobilier privé. Dans lequel Edmond de Rothschild Real Estate SICAV a investi 180 millions de francs pour la construction, en trois phases, de 5 immeubles. Un immobilier commercial assez atypique mais finalement rémunérateur, avec un taux de vacance bas, et un rendement brut de plus de 6% sur les fonds investis. Entre autres grâce à la structure originale du Biopôle où les investisseurs immobiliers bénéficient d'un droit de superficie de 80 à 90 ans.
Né en 2009, le Biopôle d'Épalinges, près de Lausanne, est aujourd'hui devenu une des plus grandes pépinières des sciences de la vie d'Europe. On y trouve plus de 150 entreprises, écoles, institutions médicales, réunies dans une quinzaine de bâtiments dans lesquels travaillent quelques 2’500 personnes.
Comme le rappelait Raphaël Conz, Managing Director du Service vaudois de la promotion de l'économie et de l'innovation, lors d'une présentation qui s'est tenue fin septembre, pendant la quatrième Journée des fonds immobiliers, dès l'époque de sa conception, au début des années 2000, le projet du Biopôle a été conçu comme faisant partie d'un réseau de pôles vaudois de développement économique avec l'EPFL Innovation Park et l’Y-parc d'Yverdon, chacun axé sur des compétences scientifiques spécifiques.
Avec, pour le Biopôle une situation un peu particulière puisque l'Etat de Vaud y avait la maîtrise foncière. Les terrains ont donc été transférés à la société Biopôle SA, charge pour elle de trouver des investisseurs pour y construire des bâtiments, tout en conservant le droit de superficie.
Ainsi, outre son aspect technologique, éducatif et économique, le Biopôle est donc aussi un énorme projet immobilier, en grande partie privé, dans lequel le fonds de placement Edmond de Rothschild Real Estate SICAV (ERRES) a investi dès le départ. Nous avons interrogé Jonathan Martin, Managing Director chez Edmond de Rothschild REIM, pour comprendre pourquoi ERRES a misé sur cet immobilier quand même assez atypique, que les spécialistes de l’immobilier titrisé ont pu visiter, fin septembre, lors de la quatrième Journée romande des fonds immobiliers, organisée par IMvestir.
Jonathan Martin, pourquoi ces investissements d'ERRES dans le Biopôle?
Si notre fonds est majoritairement résidentiel, nous voulons quand même avoir environ un tiers d'immobilier commercial. Et, dans cette catégorie, pour diversifier les risques, nous avons investi dans le Biopôle, car les sciences de la vie sont une tendance de fond, porteuse, avec un très fort potentiel. Elles sont aussi un axe de développement prioritaire du canton de Vaud, ce qui garantit un soutien public sur le site. La demande est donc forte pour des locaux dans ce secteur.
À combien se monte votre investissement?
Nous avons investi dans un premier bâtiment dès le lancement du Biopôle, puis dans un second, puis aujourd'hui dans une série de trois bâtiments qui sont sur le point d'être livrés. Au total nous allons posséder environ 35'000 m2, ce qui représente, grosso modo, 25% de la surface immobilière du Biopôle, pour un investissement de 180 millions de francs, soit environ 5% du portefeuille de notre SICAV.
En quoi ce genre d'immeuble permet-il une diversification par rapport à l'immobilier commercial standard?
La dynamique est très différente. Au Biopôle, on touche des locataires assez particuliers qui n'ont pas les mêmes besoins que dans l'immobilier commercial traditionnel. Par exemple, ils sont très exigeants en termes d'aménagement, de services annexes, de technologie du bâtiment, comme la ventilation ou le chauffage. Si ces aménagements leur conviennent, ils sont prêts à accepter un le loyer proposé, ce qui est intéressant pour nous, car cela nous permet d'obtenir une rentabilité supérieure à celle de l'immobilier commercial traditionnel.
C'est-à-dire?
Dans l'immobilier traditionnel, on tourne autour de 4-5%, alors que nos immeubles du Biopôle affichent une rentabilité brute d'environ 6%. Cette rentabilité prend en compte le fait que nous ne devons pas acheter le terrain sur lequel nous construisons nos immeubles.
Pourquoi?
Biopôle SA, l'administrateur du site, qui représente le canton et les communes, garde la maîtrise foncière et nous alloue des droits de superficie de 80 à 90 ans, pour lesquels nous payons un loyer. Ce qui est intéressant pour nous, car cela exige moins de capitaux pour chaque projet.
Quel est le montant du loyer que vous payez à Biopôle SA?
Nous avons estimé que nous allons leur verser un peu plus de 170 millions de francs, pour toute la durée des droits de superficie, entre 80 ans et 90 ans selon les immeubles. Donc, grosso modo, désormais 2 millions par année.
Quel est le locataire type de vos immeubles ?
Il y a de tout. D'une part, le secteur public est assez présent. D'ailleurs la totalité d'un de nos bâtiments est louée à l'hôpital universitaire de Lausanne. L'état de Vaud nous loue aussi des espaces. Et, finalement, il y a des entreprises établies du secteur des sciences de la vie et des jeunes pousses en train de développer leurs produits.
Ce n'est pas un peu risqué de louer à des start-up, qui peuvent littéralement disparaître d'un jour à l'autre?
Effectivement, ce n'est pas le même risque que de louer un espace à une grande chaîne de supermarchés. Mais nous estimons que c'est un risque qui mérite d'être pris, au vu du rendement supplémentaire que ces immeubles apportent. En outre, dans le cas des start-up, nous passons par une société intermédiaire qui nous garantit le loyer.
Concrètement, il y a un taux de vacance élevé dans vos immeubles du Biopôle?
Non, aujourd'hui il n'y a quasiment pas de vacance dans les deux immeubles existants. Et les trois immeubles en cours de construction sont déjà loués à 80%. Mais il est vrai que, par le passé, nous avons eu de la vacance qui a parfois duré plusieurs mois. Mais rien de rédhibitoire, nous avons toujours trouvé de nouveaux locataires. Aujourd'hui, nous avons une durée moyenne des baux de 10 ans.
Si ces investissements dans le Biopôle sont peu risqués et aussi rentables, pourquoi vous limiter à 180 millions de francs?
D'une part, parce que, aujourd'hui, le Biopôle arrive à la fin de son développement et qu'il n'y a plus beaucoup de possibilités d'extension. D'autre part, parce que le nombre de locataires intéressés n'est pas infini dans un domaine si spécifique. La solution serait d'acheter d'autres immeubles déjà existants du Biopôle, mais nous en sommes déjà l'investisseur immobilier principal et augmenter notre part dans le site ne serait probablement pas sain.
Alors d'autres investissements du même type dans d'autres villes universitaires Suisse?
C'est une thématique que nous aimerions effectivement développer mais nous attendons de trouver le bon endroit et la bonne opportunité. À noter que nos fonds immobiliers européens investissent eux aussi dans des pépinières de start-up liées aux sciences de la vie, à Paris ou à Lyon, par exemple.
Rédaction Immoday.ch
Suivez-nous sur LinkedIn.